La seconde ère, ce n'est pas un nom que l'on donne à une époque aussi troublée. Il est difficile de nommer ces atrocités, ces massacres, ce sang et ces vies volées. Je dois vous raconter ce qui s'est passé. Mais j'ai peine à le faire. Je le payerais sans doute très cher. Les écrits sont prohibés, désormais. Les chérubins nous empêchent de lire, d'écrire, de nous instruire. Nous ne pouvons rien faire, nous sommes coincés, des esclaves qui jour après jour s'éteignent. Nous reviendrons tous au néant.

L'Invasion a été rapide, violente. Les chérubins, des créatures inconnues jusqu'à lors, assoiffées de sang et de chair, sont entrés par le nord, venus sur d'immenses galères. Ils ont débarqués, ont piétiné notre nature, notre terre, celle de nos ancêtres. Ils ont détruit tout sur leur passage, tué avidement nos femmes, nos enfants. Brûlé nos fermes, nos maisons.
Elindor la Grande, la bienheureuse ville qui s'élevait autrefois dans l'air printanier, est tombé dans les premiers jours. Pillée, incendiée. Certains racontent, encore horrifiés de ces évènements macabres, que toutes ces créatures de Déphunia jetaient même les défenseurs de notre patrie par les fenêtres comme de vulgaires sacs. Ce fut un effroyable bain de sang. Les forts du nord d'Avoriaz furent écrasés sous la magie noire et malveillante de ces ennemis implacables. Ils ne s'arrêtèrent jamais. Jamais !

Après deux mois de guerre, l'intégralité du continent leur appartenait. Les survivants furent réduit en esclavage, certains parvinrent à se cacher quelques temps.

Six ans ont passés depuis cette invasion, et nous, hommes, femmes, nains, naines, muses et tous, nous ne vivons plus. Nous ne sommes plus que de la pâture pour ces diables, ils profitent de nous, se servent de nous. Des pantins, des marionnettes, des morceaux de chair. Ils nous mangent parfois, cela les fait rire. Ils nous font jouer dans des jeux du cirque atroces, des combats à mort. Ils nous font faire le travail de cent quand nous ne sommes que dix.
Il paraît que des groupes de résistants se sont formés dans les ténèbres, loin, dans les montagnes.
S'ils lisent un jour ce que j'écris, je les implore, sauvez-nous. Aidez-nous.
Les dieux nous ont abandonnés, seigneurs de Keiter. Les dieux nous ont abandonnés.